Macron-Attal / Bardella-Le Pen, bonnet blanc / blanc-bonnet ? : Certainement pas !

Malgré une résistance massive pendant plusieurs mois, notre camp social a été battu en 2023 par le macronisme et sa contre- réforme des retraites. Depuis, ce gouvernement pousse les feux en multipliant les mauvais coups : casse de l’assurance chômage, loi scélérate sur l’immigration, volonté de réformer l’aide médicale d’État… la liste est longue et elle s’accompagne d’une volonté répressive très forte : poursuites en justice de militantes et militants de gauche, de syndicats et d’associations, arrestations et violence contre des manifestants et, dernièrement, offensive contre le mouvement étudiant qui affiche son soutien au peuple de Palestine et pour un cesser le feu à Gaza. Macron cherche à nous diviser, à nous faire taire, à nous démoraliser pour mieux parachever sa casse sociale au grand bénéfice du patronat. Pour cela il utilise toutes les armes idéologiques réactionnaires : un tout sécuritaire alimenté par l’exploitation de faits divers, la lutte contre « l’assistanat », la « délinquance », « l’immigration clandestine » en espérant ainsi assécher le marigot lepéniste. Il tord pour cela dans tous les sens les usages du parlementarisme, la Constitution et l’état de droit, vidant peu à peu la République de sons sens en ne la voyant que comme un ensemble de normes minimales à savoir utiliser.

Du passé ne faisons pas table rase !

En d’autres temps, des gouvernements de droite ont mené des politiques antisociales, antisyndicales et anti- immigrés encore plus violentes ; on peut en juger par ces quelques exemples :

  • Entre 1947 et 1953 : plus de 200 demandes de levées d’immunité parlementaire, plus de 800 procédures de licenciements et des manifestations ouvrières violemment réprimées, avec des morts.
  • En 1953 : massacre de manifestants Algériens le 14 juillet place de la Nation (7 morts), suivi de l’interdiction à Paris des manifestations du 14 juillet et du 1er mai jusqu’en 1968.
  • En 1961 : massacre de plus de 200 Algériens et 12000 arrestations.
  • En 1962 : massacre de 9 militantes et militants CGT anti OAS au métro Charonne (9 morts)
  • En 1968 : répression très forte et un jeune ouvrier, Pierre Overnay, tué par un vigile, ainsi qu’un lycéen, Gilles Tautin, noyé suite à une charge policière.
  • En 1986 : mort d’un étudiant, Malik Oussekine, tué lors d’une charge des « voltigeurs ».

Les gouvernements répressifs de droite de cette époque (IVème et Vème Républiques) ne se sont pas pour autant transformés en nouveaux fascistes. Mais la grande différence avec la situation actuelle, c’est que, dans ces années-là, l’extrême droite n’avait pas encore totalement relevé la tête et n’avait pas pu profiter pleinement de la situation. Depuis, l’extrême droite FN/RN s’est enracinée dans la brèche de nos défaites et des désespoirs qu’elles suscitent. Elle se nourrit du chaos social engendré par la politique de la droite macroniste et de ses discours de plus en plus stigmatisant.

Celles et ceux qui disent que Macron « déroule le tapis rouge » à Le Pen ont raison. Mais pour autant cela ne fait pas de Macron un fasciste lui-même : celui qui déroule le tapis doit être combattu de toutes nos forces, mais celui (Bardella) ou celle (Le Pen) qui pourrait le piétiner en 2027 ou peut-être avant, c’est une autre paire de manche ! Ce ne sont que des ennemis mortels pour notre camp face à qui nous nous trouverions.

Qu’est-ce que ça changerait ?

Y compris dans notre camp certaines et certains se demandent ce que l’arrivée du RN au pouvoir changerait, d’autres disent « on ne les a pas encore essayés » ou « au moins ce sera clair », ou encore « si l’extrême droite arrive au pouvoir ce sera la révolution ». Nous répondons à cela : rien ne serait plus clair, tout serait plus sombre et plus dur encore pour toutes et tous les exploité·es et opprimé·es !

Certains pensent qu’il n’y a pas de différence de nature entre Macron et le FN/RN, mais une différence de degré. En réalité, il y a une différence de culture politique, qui se concrétise par une différence de seuils, comme on l’observe dans d’autres pays avec une extrême droite au pouvoir (Italie, Hongrie, Argentine…).

  • Les premiers à s’en apercevoir seraient les immigré·es de toutes les générations et bien sûr les migrantes et migrants, avec ou sans papiers. Un gouvernement d’extrême droite mettrait en œuvre la « préférence nationale » en l’inscrivant dans la Constitution coûte que coûte, arrêterait et expulserait sans se soucier des quelques contraintes administratives, il trouverait au sein de la Police et de la Gendarmerie des serviteurs zélés, eux qui votent déjà majoritairement pour le FN/RN ou pour Zemmour.
  • Les jeunes et d’abord ceux des quartiers populaires seraient les secondes victimes, d’arrestations, contrôles au faciès démultipliés, suppression des subventions aux associations d’aide (comme c’est déjà le cas dans les villes administrées par l’extrême droite). L’islamophobie affichée conduirait à l’explosion des violences policières. Cette répression étatique serait largement accompagnée par les groupuscules violents d’extrême droite qui se développeraient de façon significative.
  • Les plus pauvres, les plus précaires, et en premier lieu les femmes, seraient aussi visé·es au nom de la lutte contre « l’assistanat », contre les cités et les logements sociaux qui abriteraient selon eux les délinquants et le terrorisme. Un de leur récent projet de loi préconise d’ailleurs la construction de prisons considérées comme du logement social… afin que les communes n’aient pas à payer de pénalités !
  • Les droits des femmes seraient durement attaqués (retour en arrière sur l’IVG, assignation au rôle maternel et de reproductrice, les inégalités salariales se creuseraient, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles seraient remise au placard…). Les droits des personnes LGBTQIA+ seraient eux aussi durement attaqués avec notamment un retour en arrière sur le mariage pour toutes et tous.
  • Enfin, les syndicats et les associations seraient aussi durement attaqués : répression encore plus violente des militantes et militants, des manifestations, volonté d’élargir la représentativité syndicale à des syndicats « maison » qui ne « cultivent pas la grève » et objectif final de faire disparaître les syndicats organisés sur la base de la lutte des classes ; volonté d’empêcher les immigré·es d’être élu·es du personnel en remettant en cause une loi datant de 1972 ; suppression de subventions aux associations, multiplication d’attaques judiciaires et suppression de locaux.

Une grande partie du patronat – pas seulement Bolloré et ses amis de CNews – soutiendrait ce nouveau pouvoir : lassé par le chaos politique et social autour du gouvernement actuel, il prend déjà ses marques et le duo Le Pen – Bardella lui donne des gages. L’interview de Le Pen dans Les Echos et les visites de Bardella aux grands patrons qui officialisent le soutien à la lutte contre « les déficits budgétaires » ne peuvent que les rassurer. Au parlement européen, le RN a voté pour le maintien des stages jeunes gratuits en entreprise… La politique du RN ne serait pas un obstacle pour les super profiteurs. Et en prime ils espèrent remettre de l’ordre, dans un cadre encore plus autoritaire.

Enfin, toute la galaxie des petits groupuscules fascistes et les astéroïdes de Reconquête de Zemmour et qui tournent autour du RN pourraient s’en donner à cœur joie. Les « monsieur plus » démultiplieraient leurs exactions contre les militantes et militants de gauche, les syndicalistes et associations. À leur islamophobie viscérale se mêle l’antisémitisme inscrit dans leur ADN depuis toujours et qui est en recrudescence depuis plusieurs années. La situation internationale actuelle au Moyen-Orient et les crimes de guerre et contre l’humanité commis leur permettent de répandre encore plus ces deux venins.

Bien entendu, tout cela n’arriverait pas du jour au lendemain. Suivant les contingences politiques, ce pouvoir pourrait procéder d’abord par petites touches, et même faire quelques risettes aux uns et aux autres. Il essaierait de se trouver des alliés ou des transfuges du côté des Républicains (ce ne serait pas très difficile) ou même chez les anciens macronistes. Il attirerait aussi des opportunistes, carriéristes issus de la haute administration, de la magistrature, de l’armée et de la police… et aussi des médias. Mais dès son pouvoir un peu consolidé, il passerait à la vitesse supérieure et le masque de la dédiabolisation tomberait. Regardons Meloni en Italie ! Après quelques mois de tour de chauffe, elle a supprimé l’équivalent de notre RSA par un décret pris un 1er mai, elle multiplie les attaques judiciaires, elle autorise l’entrée des organisations anti IVG dans les conseils des maternités. Et, signe des temps, le 30 avril dernier 1 500 militants faisant le salut fasciste défilaient dans les rues de Milan.

Noir c’est noir mais il y a de l’espoir !

Heureusement rien n’est écrit à l’avance ; nos résistances d’aujourd’hui face au macronisme donnent des forces pour s’opposer au fascisme du 21ème siècle qui se profile. N’en doutons pas, ce scénario catastrophe n’est pas inéluctable, il ne doit pas tétaniser les forces sociales progressistes, et il nous appartient de construire dès maintenant une contre- offensive dans l’unité la plus large possible. Dans un mois l’élection européenne va malheureusement peut être offrir aux partis d’extrême droite l’occasion de montrer leur force. Il n’est jamais trop tard pour faire mentir les sondages : le 9 juin, le rejet de la liste macroniste sera légitime !

MAIS SURTOUT PAS UNE VOIX DE NOTRE CAMP SOCIAL NE DOIT S’ÉGARER VERS L’EXTRÊME DROITE :

PAS UNE VOIX POUR LES LISTES D’EXTRÊME DROITE !